Traiter les enfants atteints de maladies chroniques a Hawija, en Irak

Published 2019-08-26 14:02
Photo: A nurse during a consultation with a patient affected by a chronic disease, in Hawija Primary Healthcare Centre supported by MSF/MSF

Photo: Un infirmier en consultation avec un patient atteint d'une maladie chronique à Hawjia © MSF

Le district de Hawija, situé au nord de l’Irak, a été profondément affecté par des années de conflit et d’insécurité, et plus récemment, par le long siège et l’offensive militaire qui a suivi en 2017. LaDr Britta Koelking, responsable des activités médicales MSF à Hawija, décrit le travail de son équipe auprès des enfants atteints de maladies non transmissibles.

« Sept pourcent de nos patients sont des enfants de moins de 18 ans. Les trois principales maladies que nous traitons chez les enfants sont l’épilepsie, le diabète de type 1 et l’asthme.

Pour chaque patient que nous accueillons, MSF vérifie le premier diagnostic établi. Parfois, cela nécessite un retour à l’hôpital pour des tests de diagnostic complémentaires.

Une fois le diagnostic confirmé, nous élaborons un plan de traitement et fournissons les médicaments nécessaires. Parfois, nous diagnostiquons et traitons également des complications aiguës et à long terme telles que l’hypertension, la cécité et les infections chroniques.

L’une des maladies chroniques les plus courantes chez les enfants est le diabète de type 1, une maladie chronique au cours de laquelle le pancréas produit peu ou pas d’insuline, une hormone nécessaire pour que le glucose pénètre dans les cellules afin de produire de l’énergie. 

Il est très important que les patients atteints de diabète comprennent les raisons pour lesquelles leur taux de glycémie dans le sang change tellement. Cela les aide à affronter la maladie, à comprendre le besoin d’un régime alimentaire spécifique à long terme et à comprendre pourquoi ils s’injectent régulièrement de l’insuline. Mais ce processus n’est pas toujours facile, surtout avec les enfants.

Chez les enfants atteints de diabète, un haut niveau d’autodiscipline est requis dès le plus jeune âge. Cela nécessite de faire attention à ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas manger, c'est un mode de vie différent. Ils ont plus de responsabilités que les autres enfants en matière de soins personnels et doivent se rendre compte qu’ils vivront avec cette maladie toute leur vie. Cela peut être difficile à accepter à un si jeune âge.

Malheureusement, nous observons des complications graves à un jeune âge, par exemple une vision altérée ou même une cécité. Celles-ci peuvent être évitées grâce à une éducation à la santé, un suivi approprié et un traitement adapté.

J’ai également vu des ulcères chroniques sur les pieds et des maladies cardiovasculaires chez ce jeune groupe de patients.

Les enfants de nos cliniques nous disent qu’ils craignent souvent de s’injecter de l’insuline à l’école. Nous avons observé des cas où des parents retirent leurs enfants de l’école parce qu’ils ont peur que leur enfant soit stigmatisé ou souffre d’une des complications aiguës du diabète, telle que l’hypoglycémie – un effet secondaire aigu et grave du traitement à l’insuline. Une hypoglycémie légère présente des symptômes tels que transpiration, tremblements, vertiges et confusion. Une hypoglycémie grave peut entraîner un coma, des lésions cérébrales et la mort.

Cela me brise le cœur de voir ces enfants retirés de l’école, car le manque d’éducation pourrait leur créer des problèmes supplémentaires.

Adapter le mode de vie d’un enfant diabétique signifie adapter le mode de vie de toute sa famille. Les repas doivent être préparés différemment et servi à un rythme différent. Les sucreries et les boissons sucrées doivent être évitées. Les familles ici, en Irak, vivent et mangent généralement ensemble. Il peut donc être difficile pour elles de modifier le régime alimentaire d’une seule personne dans la famille. 

Un grand défi des maladies chroniques en général et du diabète en particulier est que les patients ne comprennent souvent pas le danger de la maladie, car les complications à long terme ne sont pas évidentes au début. Il faut souvent attendre 10 ou 20 ans pour que les complications commencent à apparaître. De ce fait, cela peut être compliqué de convaincre une personne qu’elle a besoin de prendre ses médicaments ou de s’en tenir à son régime alimentaire, en particulier lorsque certaines familles vivent dans un context de post-conflit. Ils ont peut-être perdu des êtres chers ou ont du mal à retrouver une vie normale. De nombreux ménages manquent de revenus et sont sans emploi. Pour les enfants qui dépendent de leurs parents et de leur famille, l’éducation des patients doit être réalisée non seulement pour l’enfant, mais également pour toute la famille.

Bien que les enfants atteints de maladies chroniques ne semblent pas, à première vue, être très malades, négliger leur éducation, leur nouveua mode de vie et leur traitement peut entraîner des complications graves engageant le pronostic vital à un jeune âge.

Les complications graves incluent les maladies cardiovasculaires: il existe un risque élevé de crise cardiaque à un jeune âge, les maladies cérébrovasculaires: il existe un risque particulier d’accident vasculaire cérébral à un jeune âge, la néphropathie diabétique ou insuffisance rénale qui rend la dialyse nécessaire, les infections graves, en particulier aux pieds, qui ne peuvent plus être traitées et qui pourraient conduire à une amputation des pieds ou des jambes. Tous ces facteurs peuvent avoir un impact considérable sur les patients et leur famille.   

Les maladies chroniques sont des affections qui durent longtemps et qui peuvent avoir des conséquences à vie. De plus, les patients se sentent généralement en bonne santé et c'est pour cette raison qu'ils peuvent avoir tendance à s’éloigner du plan de traitement indiqué.

C’est pourquoi nous fournissons non seulement des traitements et des médicaments, mais également un soutien psychosocial et une éducation à la santé. Nous essayons d'avoir une approche holistique de la prise en charge des maladies chroniques. Les conseillers en santé mentale soutiennent les patients tout au long de leur traitement. Les séances d’éducation à la santé sont un outil fondamental pour sensibiliser à l’importance de suivre un traitement régulièrement et d’avoir un mode de vie sain. »

MSF a débuté ses activités à Hawija en 2009 et répond actuellement au manque de services de soins de santé dans le district. Les équipes de MSF travaillent actuellement dans les centres de santé primaires de Hawija et d’Abassi, où elles fournissent des traitements contre les maladies non transmissibles, des sessions de promotion de la santé et des soins de santé mentale. MSF soutient également le principal hôpital de référence du district avec des soins de maternité, des soins d’urgence, des activités de laboratoire et des mesures de prévention et de contrôle des infections.

En 2018, MSF a proposé des consultations et des traitements à plus de 2 900 patients atteints de maladies chroniques à Hawija et à Abassi.

Photo: Hawija Primary Healthcare Centre supported by MSF, an MSF health promoter runs an education session about non-communicable diseases in the waiting room./MSF

Photo: Un agent fait de la promotion de la santé et parle des maladies non transmissibles dans une salle d'attente MSF © MSF